• Le chant de la Sybille...

     http://www.jfbrun.eu/lengadoc/sibilla.htm

     

     

    On se souvient de l'importance attribuée aux oracles sibyllins par l'antiquité païenne, et, après elle, par la primitive Église.

     

    Varron, Cicéron et Virgile ont plusieurs fois mentionné les fameuses prophétesses; Tacite et Suétone, notamment, ont rapporté cette attente générale qui préoccupait tous les esprits, à l'époque de la venue du Messie dans le monde gréco-romain. Peut-être, avec la géniale intuition des poètes, Victor Hugo avait-il entrevu la véritable explication de ce fait historique et providentiel, lorsqu'il écrivait :

     

    Dieu voulait qu'avant tout, rayon du Fils de l'Homme,

    L'aube de Bethléem blanchît le front de Rome 1

     

    A leur tour, les Pères de l'Église rappelèrent fréquemment les témoignages des Sibylles, dont les oracles avaient été, probablement au cours du dernier tiers du IIIesiècle, rédigés en grec et rassemblés en quatorze livres ou chants, dont plusieurs étaient certainement des interpolations chrétiennes.

    Parmi les vers ajoutés ou remaniés, se trouve un poème acrostiche sur la fin des temps, composé de 27 hexamètres, ce qui est déjà un nombre fatidique, puisqu'il représente le cube de 3 : ut ex lato in altum figura consurgal; l'acrostiche donne les cinq mots grecs qui signifient : « jesus Xrist, Fils de Dieu, Sauveur », ou, en réunissant les lettres initiales de ces cinq mots, l'I X 0 Y S, ou poisson symbolique 2, nom mystique de Jésus-Christ, qui, dans les abîmes de notre mortalité, comme dans les profondeurs des eaux, a pu demeurer vivant, c'est-à-dire exempt de péché.

    Attribué à la Sibylle Érythrée, ce fragment fut cité par l'empereur Constantin dans son discours Ad sanctorum coetùm, puis traduit en latin et introduit dans un sermon de Symbolo, dont l'auteur passa longtemps pour n'être autre que saint Augustin lui-même.  On sait comment ce sermon fameux prit de bonne heure, dans l'Église latine, une place dans la liturgie : on le récitait en beaucoup de lieux, le jour de Noël, à Matines; bientôt, on chanta le fragment sibyllin en forme de versus, soit en procession, soit en accompagnant un « jeu » ou «mystère », soit, le plus souvent, après l'une des leçons du 2e nocturne.  M. Marius Sepet, au surplus, a montré comment le drame liturgique était sorti de ce sermon, célèbre dans toute la chrétienté .

     

    Pour les artistes du moyen âge, la Sibylle devint le profond symbole de l'attente des Gentils; une place lui fut réservée au portail des cathédrales 4, et la mystérieuse inspirée hanta longtemps encore l'imagination des poètes.

    Dans la Fontaine amoureuse, poème qui date de I362, Guillaume de Machaut nous montre trois déesses assises devant une table « d'or fin esmaillé », d'un admirable travail :

     

     

    Car les ymages et la vie

    Y estoient des dis Sebilles

    Qui sages furent et abilles,

    Et qui tant fort estudièrent

    Que toutes dis prophetiserent

    De l'avènement Jhesucrist

    Si com veü l'ay en escript 

     

    En plein XVIe siècle, dans sa Défense et Illustration de la langue française (1549), Joachim du Bellay faisait allusion à l'usage du chant de la Sibylle, pratiqué de son temps « en divers lieux » ; et, en 1619, le confesseur de Louis XIII, le P. Nicolas Caussin, écrivait encore une grande dissertation sur les oracles sibyllins.

     

    Le chant de la Sibylle se rencontre dans plusieurs manuscrits, parfois accompagné de sa notation musicale, et même, mais plus rarement, avec son titre.

     

    Dans un manuscrit du IXe siècle (latin: 1154), conservé à la Bibliothèque Nationale, il figure avec le titre : Versus Sibylle de Die Judicii; à la même bibliothèque, dans un Lectionnaire limousin du XIIIe siècle (ancien lat.781) il figure avec le titre : Versus Sibylloe cum cantu et explicatione in fine.

     

     

    Vers 1860, de Coussemaker, dans son Histoire de l'Harmonie au Moyen Age, décrivit les plus anciennes versions, connues à cette époque, de ce chant ; plus tard, Barbier de Montault publia dans la Musica Sacra de Toulouse (3e année, 1876-1877) un article sur le même sujet : Les Sibylles dans le chant de l'Église; mais il appartenait à Dom Pothier, étudiant les diverses versions mélodiques, simples ou ornées, du fameux poème, d'en faire connaître de nouvelles : l'une, simple et fort ancienne, qui se trouve dans le manuscrit     coté B.5, à la Bibliothèque Vallicellane de Rome, et d'autres, plus récentes et très ornées, telles que les donnent un Processionnal de Bourges imprimé en 1517, et un Antiphonaire manuscrit du XVIe siècle conservé à la Bibliothèque Mazarine (mss. 386).

     

     

     https://fr.wikipedia.org/wiki/Chant_de_la_Sibylle

    https://www.youtube.com/watch?v=iF1VClOAeyE

    https://www.youtube.com/watch?v=wzffW6dwHH4


  • Commentaires

    1
    Soeur Josette
    Samedi 9 Décembre 2017 à 21:15
    Père Michel, comme il est nourrissant d'apprendre en s'amusant à chacune de vos rubriques où se lisent à la fois l'amour et la connaissance des mystères du Seigneur!
    UDP
    2
    Ondulation 2000
    Dimanche 10 Décembre 2017 à 11:53
    Il est savant notre prêtre
    3
    Teo
    Lundi 11 Décembre 2017 à 12:31
    Soeur Josette, c'est un peu la Sybille de Rocamadour.
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